Les dirigeants nationaux du PS, à de très rares exceptions près, donnent un spectacle attristant du socialisme français depuis la lourde défaite des Européennes. En réalité depuis le 21 avril 2002, si l’on veut bien être sincère. Qu’ils se rassurent, certains de leurs épigones locaux, remportent le challenge de faire pire qu’eux !
Réunis en Conseil fédéral du PS nivernais hier soir à Fourchambault, nous avons assistés perplexes, sidérés, pour tout dire affligés, à une réunion digne de la « grande » époque de la SFIO.
Face aux militants, une brochette de hiérarques socialistes locaux, visiblement endormis depuis Epinay, et dont on se demande s’il est bien prudent de les réveiller en 2009, quarante ans plus tard, pour les prévenir que les temps ont changé, que le monde a changé !
Un peu comme dans le film Good bye Lenin !, les enfants d’une femme tombée dans le coma avant la chute du Mur de Berlin, tente d’éviter à cette dernière un trop grand traumatisme en lui masquant les changements intervenus en Allemagne depuis l’effondrement de la RDA.
Florilège d’analyses entendues. Attention, c’est de la haute volée :
- La Nièvre réaliserait le 4ème meilleur score au niveau national. Bravo à nous, et peu importe que ce soit l’un des pires scores socialistes dans l’histoire départementale …
- Nevers et la 1ère circonscription sont, avec Monceaux les Mines, les deux seuls îlots régionaux où le PS devance l’UMP ; comme en 1993 ! Bravo à camarades de Nevers, donc, et peu importe que le PS y abandonne 15 points par rapport aux européennes de 2004. Après, tout, la même contre performance se retrouve partout, hélas !
- Le PS français n’aurait rien à se reprocher. Le Manifesto, ce programme européen commun aux 27 partis socialistes et sociaux-démocrates de l’UE, nous aurait plombés, faisant rejaillir sur nous, gentils socialistes français, excellents élèves, quoiqu’incompris, de l’Internationale socialiste, l’ombre terrible des dérives libérales de nos camarades britanniques et espagnols. Les mêmes camarades socialistes britanniques et espagnols qui, est-il besoin de le rappeler ?, gagnent régulièrement les élections générales dans leur pays quand nous, en France, n’avons plus remporté une élection présidentielle depuis la victoire de François Mitterrand en 1988, il y a 21 ans ! Nous aurions raison, ils auraient torts … Continuons ainsi !
- Le PS français serait enfin victime de la droitisation d’une partie de ses militants, lesquels seraient tentés par une alliance avec le Modem. Le refrain est bien connu : les dirigeants portent un morceau de la Sainte Croix, les minorités ont tort et les déviants doivent être accusés de tous les maux, quand bien même faudrait-il en inventer …
Dans cet océan de sectarisme navrant, des camarades, heureusement, ont pris la parole pour tenter de faire entendre quelques remarques de bon sens.
Martine Carrillon-Couvreur s’est ainsi demandé pourquoi l’abstention avait été si forte et a rappelé que le PS ne tranchait plus de questions de fond depuis des années. Elle a précisé, à raison, que le contraste avec notre groupe parlementaire de l’Assemblée, qui, lui, travaille, est important.
Roland a rappelé combien le Parti s’est peu à peu coupé des salariés, refusant de voir combien ceux-ci souffrent en silence de la concurrence internationale, réelle ou utilisée comme prétexte par certains patrons, s’étant aggravée depuis la chute du Mur de Berlin. Il s’est félicité que cette fois-ci le vote populaire se soit réfugié majoritairement dans l’abstention et non dans le vote extrême.
Marcel et plusieurs autres camarades ont noté combien nos divisions nous étaient préjudiciables et nous faisaient perdre en crédibilité. Je partage d’ailleurs leur point de vue. Et je m’interroge dès lors, mais j’y reviendrai ultérieurement, sur la recette miracle agitée par certains responsables, les fameuses primaires ? Notre mode désignation en 2006 ayant été vécu par le peuple de Gauche non pas comme un grand moment de démocratie socialiste mais comme un grand moment de division entre socialistes, comment ne pas craindre que les primaires, système adapté à l’Etat fédéral américain, déjà beaucoup moins à l’Italie, ne produise en France des effets décuplés par rapport au processus de 2006 ?
Pour revenir aux causes de la défaite de l’autre dimanche, j’ajouterai pour ma part la cécité d’une part importante des cadres locaux du PS.
On pourrait en effet dire bien des choses sur la façon dont, dans le département, cette campagne a été menée, ou plutôt dont elle n’a pas été menée.
Selon mes propres observations, le bilan départemental de ces européennes pourrait se résumer ainsi :
- La Fédération n’a défendu la « candidature à la candidature » d’aucun(e) Nivernais(e). La Nièvre n’était donc pas représentée sur la liste socialiste du Grand-Est.
- La Fédération n’a même organisé aucune campagne.
§ Aucune réunion publique et d’action militante programmée ;
§ Aucun comité de suivi de campagne ; et pour cause … qu’aurait bien pu suivre ce comité ?
§ Pas davantage de Comité de soutien nivernais à la liste de Catherine Trautmann.
§ Les rares réunions publiques organisées n’ont pas été le fait de la fédération, mais de sections qui, elles, gardent le sens de l’engagement militant. Catherine Trautmann est ainsi venue à Luzy dans le cadre du banquet annuel de la section. Mustapha Sadni est venu à Fourchambault à l’invitation des sections du sud de la 2ème circonscription. Aurélie Filippetti est venue à La Charité à l’invitation des sections de La Charité, de Nevers et de Cosne.
§ Notons d’ailleurs, que cette dernière, bien que troisième sur la liste et initialement conviée à clore la campagne à Nevers, comme nous avons la coutume, avait été étrangement décommandée par le Premier secrétaire fédéral au profit de Marie-Noëlle Lienemann, non candidate aux européennes, non élue dans le Grand-Est, et dont la seule actualité était la démission de la mairie d’Henin Beaumont, où elle avait été élue un an plutôt en deuxième position sur une liste dont le numéro 1 était un dissident du PS dont la justice devra dire dans les prochaines semaines s’il a tapé ou non dans la caisse municipale.
- Il faut toutefois, pour être honnête, porter au crédit de la fédération une tentative de « e-campagne », de campagne virtuelle (forcément virtuelle …) en bon français :
§ Les camarades possédant un email ont ainsi reçu un nombre important de messages. Dans un tel contexte, la direction fédérale craignait sans doute que tous les encartés ne votent pas pour leurs propres candidats. C’est sans doute pourquoi nous avons aussi reçu un journal fédéral 3 jours avant le vote. Ne faudra t-il à l’avenir étendre nos messages de campagne aux sympathisants socialistes, aux électeurs de gauche et pourquoi pas, soyons ambitieux, à tout le corps électoral ?
§ Un blog a également été mis en ligne. Les messages envoyés n’étaient pas toujours exacts (Aurélie Filippetti n’a été annoncée que la veille de la réunion et … à Fourchambault pour une réunion se tenant à la Charité), mais c’est néanmoins un progrès.
- Un regret toutefois. On ne saura jamais si une vraie campagne aurait donné un meilleur résultat. J’avais de mon côté, à l’occasion des deux derniers bureaux fédéraux (en réalité les deux seuls BF réunis depuis le dernier congrès !), émis l’idée de réunions publiques cantonales. Proposition rejetée. C’était pourtant l’occasion de s’appuyer sur le dense réseau d’élus socialistes nivernais (maires, conseillers généraux, parlementaires) pour informer de vrais citoyens de nos vraies propositions et les convaincre vraiment de nous faire confiance, une fois encore. Un parti qui ne refuse pas un vrai contact en face à face avec les électeurs est un parti qui a encore de l’espoir …
Au final, l’UMP devance le PS dans le département pour la première fois depuis 1969 et la longue érosion des positions socialistes suit tranquillement son cours, sans que la direction départementale ne trouve à y redire.
Commencé sur une référence à « Good Bye Lenin ! », ce papier sera conclu sur une autre référence cinématographique … Il faut bien observer, à défaut de l’admettre, que si le navire socialiste coule, l’orchestre des joyeux apparatchiks continue de jouer sa petite musique de nuit !
Je terminerai sur une note optimiste, un grand bol d’air frais : un sénateur-maire présent hier a annoncé publiquement qu’il ne se représenterait ni aux prochaines municipales, ni aux prochaines régionales … « Les promesses n’engagent … », je vous laisse terminer la phrase !
Dernière minute : le Conseil des Gardiens de la Constitution iranien se déclare prêt à un recompte des voix … Il y a donc plus de souplesse chez ces fondamentalistes religieux que dans la direction socialiste nivernaise, incapable de se pencher sur les vraies causes de notre défaite !
NB : Last but not least, le deuxième point de l’ordre du jour, à savoir l’organisation de la fédération (toujours pas mise en place 8 mois après le congrès de novembre 2008), a été ajourné, malgré la tentative courageuse de Hicham Boujlilat d'en appeler à un travail régulier et unitaire ; les militants en seront informés par le prochain journal interne …
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